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La convention de mandat, un nouveau cadre

Yaïche Issa
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La convention de mandat, un nouveau cadre
Externaliser l’encaissement et le remboursement des usagers des transports

Le décret n°2022-1307 du 12 octobre 2022, pris en application des articles L. 1611-7, L. 1611-7-1 et L. 1611-7-2 du code général des collectivités territoriales, permet aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM) et à leurs établissements publics, sur avis conforme du comptable public, de confier à un organisme public ou privé l’encaissement des recettes des services de mobilité ou de stationnement, ou d’un service numérique multimodal. Il permet également le paiement des dépenses de remboursement, notamment des usagers de ces services.

L’extension des conventions de mandat aux services de mobilité offre un cadre plus flexible que celui des régies d’avances et de recettes existant jusqu’alors. Les conventions de mandat permettent ainsi à un organisme privé d’encaisser directement les recettes au nom et pour le compte d’un établissement public, sans risque de qualification de situation de gestion de fait. En outre, elles permettent de :

  • Disposer d’un dispositif plus adapté pour gérer des montants et des volumétries de plus en plus importants ;
  • Intégrer des schémas de contractualisation complexes, tenant compte des innovations sur le marché en matière de billettique, lesquels peuvent faire impliquer plusieurs organismes privés ou publics dans les chaînes d’encaissement de recettes publiques ;
  • Ne pas bouleverser la comptabilité de ces organismes, sous réserve d’assurer une traçabilité des chaines financières et de fournir un certain nombre d’éléments de justification ;

Si le dispositif se veut plus souple, il engage les parties prenantes sur un certain nombre d’enjeux.

Les enjeux pour les mandants

Pour les mandants, les principaux enjeux consistent à respecter avant tout la réglementation, à réunir les conditions d’obtention d’un avis conforme du comptable public ainsi qu’à s’assurer de la capacité du mandataire à respecter les termes de la convention. Cela passe notamment par :

  • Une rédaction des conventions dans des termes suffisamment explicites, allants au-delà de la simple reprise de la réglementation ;
  • Une nécessaire assimilation, documentation et maîtrise des chaînes d’encaissement et de remboursement « de bout en bout », notamment lorsqu’elles intègrent une multiplicité d’acteurs, d’outils et de modes de fonctionnement 
  • Une réflexion au cas par cas pour préciser et illustrer les pièces attendues du mandataire dans le cadre de la justification des opérations et de la reddition des comptes, ainsi que les temporalités de reversement associées, car les calendriers des parties prenantes ne sont souvent pas concordants 
  • Une étude approfondie, en lien avec le comptable public, des modalités de traitement de certains cas particuliers (exemples : gestion des impayés, produits constatés d’avance, etc.), susceptibles de présenter des différences de traitement entre mandataire et mandant ;
  • Une adaptation de son organisation, de ses processus et des schémas comptables pour se préparer à intégrer et à contrôler les éléments qui seront transmis par les mandataires ;
  • L’anticipation des modalités d’exploitation de ces éléments dans le cadre d’un renforcement de la fonction contrôle de gestion pour sécuriser l’analyse des liens physico-financiers et produire les éléments de reporting aux instances de gouvernance.

Les enjeux pour les mandataires

Pour les mandataires, les enjeux consistent à réunir l’ensemble des conditions pour se conformer aux termes de la convention afin d’éviter l’application d’éventuelles pénalités ou tout défaut en cas de contrôle par le mandant ou d’un auditeur tiers. Cela passe notamment par :

  • Une organisation et des processus internes suffisamment fluides et intégrés entre services métiers et financiers permettant de sécuriser le contrôle des recettes et des dépenses et la production des justificatifs attendus dans la convention. Cela peut aller jusqu’à la mise en place d’une cellule centralisée de contrôle dans le cas de multiples conventions avec des établissements publics ;
  • Une production autant que possible automatisée des justificatifs attendus par la convention ;
  • Le renforcement de la documentation des pratiques (voire une harmonisation des pratiques lorsque différents services sont concernés ou que plusieurs conventions sont conclues avec des établissements publics différents) et des dispositifs de contrôle interne ;
  • La sécurisation des conditions de traçabilité des opérations, notamment en matière de comptabilité et dans les systèmes d’information dans lesquels transitent les flux, dans la mesure où les comptes produits par le mandataire doivent retracer la totalité des opérations de dépenses et de recettes décrites par nature, sans contraction entre elles, ainsi que la totalité des opérations de trésorerie par nature ;
  • L’animation du pilotage de l’activité de mandataire.

En synthèse, les conventions de mandat sur le périmètre des services de mobilité sont encore récentes et font l’objet d’une amélioration continue entre les mandants et les mandataires déjà signataires. 

Une des conditions de réussite est l’instauration d’une approche partenariale entre le mandant, son comptable public et le mandataire, dès la rédaction même de la convention – dans le cas où la procédure de marché / contractualisation le permet – et lors de son exécution afin d’assurer une compréhension mutuelle des éléments échangés. 

Avec l’avènement des services numériques multimodaux (SNM), les conventions de mandat vont se démultiplier, d’où l’opportunité pour les différents acteurs intéressés de s’y préparer dès à présent.