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CSRD et Taxonomie européenne : les dernières évolutions réglementaires

By:
Pierre Lemoine
CSRD et Taxonomie européenne

Proposée en avril 2021 par la Commission européenne, la Corporate Sustainability Reporting Directive, dite CSRD, a été publiée au Journal Officiel de l’UE le 16 décembre 2022. Cette nouvelle directive révisera l’actuelle Non Financial Reporting Directive (NFRD) de 2014, transposée en droit français avec la Déclaration de Performance Extra-Financière, qui impose la publication d’informations en matière de durabilité pour certaines entreprises.

Quels acteurs seront concernés par la CSRD ? Quelles sont les obligations prévues ? Comment s’harmonisera-t-elle avec les textes actuels et futurs, dont la Taxonomie européenne ?

La CSRD, un périmètre beaucoup plus large

Elément important du Green Deal européen, la CSRD prévoit d’élargir de manière importante le périmètre actuel concernant l’obligation de publication d’informations extra-financières : près de 50 000 entreprises seront concernées par cette directive, alors qu’aujourd’hui, environ 11 000 acteurs seulement doivent se soumettre à l’exercice. En effet, la CSRD prévoit d’abaisser les seuils d’application par rapport à la NFRD, qui touchait uniquement les grandes entreprises de plus de 500 salariés.

Toutes celles respectant deux des trois critères suivants entreront dans le champ de la CSRD :

  • Un nombre de salariés supérieur à 250,
  • Plus de 40 millions d’euros de chiffre d’affaires,
  • Un total de bilan excédant 20 millions d’euros.

En parallèle, les PME cotées (sauf microentreprises) et certaines entreprises non-européennes devront se conformer avec les obligations de publication d’un rapport de durabilité. Ce dernier sera intégré dans une section du rapport de gestion.

Le calendrier de la CSRD

La CSRD sera déployée de manière progressive :

  • Aux entreprises soumises à la NFRD dès le 1er janvier 2024, qui devront publier des informations concernant leurs impacts sociaux et environnementaux en 2025,
  • Aux entreprises respectant deux des trois critères évoqués plus haut à partir du 1er janvier 2025, avec une publication en 2026,
  • Aux PME cotées dès le 1er janvier 2026, avec une possibilité d’exemption jusqu’en 2028,
  • Aux entreprises non-européennes à partir du 1er janvier 2028.

Du rapport extra-financier au rapport de durabilité : les futures attentes de la CSRD

L’une des principales modifications de la NFRD par sa remplaçante est la publication d’informations standardisées, selon 12 normes développées par l’EFRAG1 et présentées à la Commission européenne en novembre 2022. Elles seront adoptées au plus tard le 30 juin 2023. Les informations à publier se concentreront autour des enjeux ESG (changement climatique, effectifs de l’entreprise, ou encore conduite des affaires), et des principes généraux à respecter pour la communication, comme la double matérialité. Cette dernière prévoit d’aborder une approche à deux sens concernant les impacts : les effets des activités de l’entreprise sur l’environnement et la société (matérialité impact), et ceux des enjeux de durabilité sur l’entreprise (matérialité financière).

Un autre jeu de normes sectorielles sera adopté au plus tard le 30 juin 2024. Par ailleurs, les PME auront la possibilité d’adopter des normes allégées pour la publication du rapport de durabilité.

Les communications des entreprises seront aussi soumises à une vérification obligatoire par un Commissaire aux comptes ou un Organisme Tiers Indépendant (OTI).

CSRD et Taxonomie

Les liens de la CSRD avec les autres textes européens

L’un des objectifs du Green Deal européen est l’absence d’émission nette de gaz à effet de serre d’ici 2050. Afin d’y parvenir, la transparence sur les enjeux de durabilité doit devenir la norme, qui permettrait aussi aux investisseurs de réorienter les flux de capitaux vers des activités durables.

La CSRD s’harmonisera donc avec la réglementation existante et future, dont le règlement SFDR et la Taxonomie européenne. Cette dernière se traduit par un système de classification des activités durables à travers six objectifs environnementaux.

Entrée en vigueur en janvier 2022, elle requiert que les entreprises sujettes à la NFRD publient des informations sur les deux premiers objectifs (atténuation du changement climatique et adaptation au changement climatique) en matière d’éligibilité. Depuis 2023, les acteurs concernés doivent désormais compléter leur communication par des informations sur leur alignement : conformité des activités éligibles aux critères d’examens techniques, absence de préjudice important à l’un des cinq autres objectifs (Do Not Significant Harm, DNSH), et respect des garanties minimales (principes directeurs de l’OCDE, l’ONU et l’OIT relatifs aux droits de l’Homme).

Après publication des quatre autres objectifs, les entreprises concernées devront réaliser l’exercice dans son intégralité. En parallèle, le champ d’application se calquera sur celui de la CSRD. Ainsi, les obligations des entreprises en matière de durabilité seront de plus en plus nombreuses et pointues.

L’harmonisation des différents textes européens par la CSRD prévoit des communications plus complètes, comparables et contrôlées. Les interrogations des entreprises sont nombreuses, notamment sur les informations obligatoires à produire ou encore sur la double matérialité.

En parallèle, l’inclusion des PME dans le champ CSRD, qui ne bénéficient pas des mêmes ressources que les grandes entités, pourra être délicate. Afin d’avoir un aperçu des exigences qui pourraient être retenues, les normes transmises à la Commission européenne sont consultables sur le site internet de l’EFRAG. Se mettre en ordre de marche pour repenser son processus de reporting dès cette année permettrait d’aborder au mieux cette vague réglementaire à venir.


1 First Set of draft ESRS - EFRAG